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La plus grande crise en Europe depuis la Seconde Guerre mondiale et l’ébranlement des accords de sécurité internationaux – c’est ce que la Russie a accompli en lançant une attaque de grande envergure contre l’Ukraine.
Les actions terroristes du pays agresseur mènent à la mort de civils, à la destruction d’infrastructures civiles et à des catastrophes d’origine humaine dans la zone de guerre. Les conséquences en sont ressenties non seulement en Ukraine, mais aussi dans d’autres États avec lesquels des relations de différents niveaux ont été établies.

Le monde vient tout juste de se remettre de la pandémie de COVID-19, et il est maintenant confronté à la hausse du prix des aliments et de l’énergie, et aussi – aux menaces de guerre nucléaire. De nombreux étrangers se lamentent, et la Russie continue de bombarder chaque jour des villes et des villages ukrainiens. Voilà comment elle influence l’ordre mondial, car toutes ces crises sont le résultat de la grande guerre commencée par la Fédération de Russie, et non de la résistance des Ukrainiens qui défendent leurs terres contre les envahisseurs. Nous vous expliquons quelles crises sont à mettre au “palmarès” du pays agresseur.

La crise alimentaire

Avant le début de la guerre à grande échelle, les prix mondiaux des aliments avaient déjà commencé à augmenter en raison des conséquences économiques de la pandémie de coronavirus COVID-19. Pendant les confinements, l’activité économique dans le monde a fortement diminué. Le Fonds monétaire international (FMI) estime que le PIB mondial moyen a chuté de 3,9% de 2019 à 2020, soit la pire baisse depuis la Grande Dépression. Lorsque les restrictions de quarantaine ont commencé à être levées, et que l’économie a commencé à se relever, les prix ont grimpé en flèche.

La Grande Dépression
Crise économique mondiale qui a duré de l'automne 1929 à la fin des années 1930 et qui a surtout touché les pays d'Europe occidentale et les États-Unis.

En outre, la pandémie a gravement affecté les chaînes logistiques mondiales, ce qui a également contribué à la hausse du prix des aliments et à la propagation de la faim dans le monde. Ainsi, selon les statistiques, environ 9 millions de personnes meurent de faim chaque année. À titre de comparaison, pendant toute la durée de la pandémie depuis 2019, le nombre de décès était inférieur et atteignait 6,5 millions de personnes. Les actions militaires de la Russie en Ukraine n’ont fait qu’aggraver la crise alimentaire mondiale.

Photo : Yefrem Lukatsky

Historiquement, l’Ukraine est un grand exportateur de céréales. En 2021, le pays a nourri 400 millions de personnes dans le monde. Avant 2022, il exportait en moyenne 50 millions de tonnes de produits agricoles par an. Ensemble, l’Ukraine et la Russie exportaient près d’un tiers du volume de la production mondiale de blé et d’orge. En outre, en 2020–2021, l’Ukraine a exporté 5,27 millions de tonnes d’huile de tournesol, ce qui représentait 46,9% des exportations mondiales.

Environ 90% du blé et d’autres céréales provenant des champs ukrainiens ont été transportés vers les marchés mondiaux par voie maritime. Après l’invasion à grande échelle, la Russie a bloqué la côte de la mer Noire, ainsi pendant les 5 premiers mois de la grande guerre, l’exportation de céréales par les principales routes maritimes a été contrainte de s’arrêter.

En outre, la Russie bombarde régulièrement les infrastructures agricoles, met le feu aux récoltes dans les champs et vole les grains ukrainiens. Des images satellite prises fin mai par Maxar Technologies ont montré qu’en mai, des navires sous drapeau russe ont été chargés de céréales dans un port de Crimée, et quelques jours plus tard, ils ont accosté en Syrie avec leurs écoutilles ouvertes. Il est intéressant de noter qu’au même moment, le président russe Poutine a déclaré que la récolte de cette année en Russie pourrait atteindre le chiffre record de 130 millions de tonnes.

Les actions criminelles de la Fédération de Russie ont amplifié la crise alimentaire mondiale, qui a des conséquences catastrophiques pour le monde entier. Le blocage des exportations de céréales ukrainiennes a exacerbé la faim dans certaines des régions les plus vulnérables du monde. L’approvisionnement en céréales a été partiellement rétabli grâce à de longues négociations. Le 22 juillet, l’Ukraine, la Russie et la Turquie ont signé un accord sur le rétablissement de l’exportation sécurisée des céréales ukrainiennes par la mer Noire. Cela a permis de débloquer les approvisionnements, mais la situation alimentaire mondiale reste critique. Par exemple, en Afrique de l’Est, la sécheresse persistante, le blocage des céréales et les conséquences économiques de la guerre en Ukraine ont déjà provoqué une famine de masse, et 3 millions de personnes pourraient mourir dans la région.

Фото: Кевін Картер.

Selon l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), sur la période de l’été 2021 à l’été 2022, les prix mondiaux de la viande ont augmenté de 8,2%, ceux des produits laitiers de 23,5%, ceux du blé de 10,6%. Et dans le futur, ils continueront à augmenter. Dans le pire des cas, selon les estimations de l’ONU, les prix mondiaux des produits alimentaires pourraient encore bondir de 8,5% d’ici à 2027. La FAO prévoit également que pour l’année 2022, jusqu’à 181 millions de personnes dans 41 pays pourraient être confrontées à une crise alimentaire ou à des niveaux de faim encore plus élevés.

La crise énergétique

La Russie est l’un des principaux acteurs du marché mondial de l’énergie. Elle est l’un des trois premiers producteurs mondiaux de pétrole et le premier exportateur mondial de gaz. Dans une large mesure, le pays dépend des revenus obtenus de ces matières premières. Par exemple, en 2021, elles représentaient 45% du budget fédéral russe. Cela permet au pays agresseur de manipuler la question du pétrole et du gaz lorsqu’il s’agit d’intérêts politiques.

Même avant l’invasion à grande échelle de l’Ukraine, la situation des ressources énergétiques dans le monde était difficile. Les pays ont commencé à se remettre de la pandémie de COVID-19, et le redémarrage rapide de la production a entraîné une hausse des prix du charbon, du gaz naturel et du pétrole. Dans le même temps, la Russie a profité de son statut de monopoliste sur le marché européen du gaz, réduisant les approvisionnements et augmentant les prix.

C’est ce qui est indiqué dans la déclaration de l’Agence internationale de l’énergie (ci-après “l’Agence”) en septembre 2021. En raison des prix anormaux du gaz, certaines usines européennes d’engrais ont même dû fermer (certaines usines de CF Fertilisers à Ince en Grande-Bretagne, Agropolychim et Neochim en Bulgarie), tandis que le prix des engrais a augmenté de 300% en un an. Cela a eu une influence directe sur la situation alimentaire.

En janvier, l’Agence a de nouveau sonné l’alarme, soulignant que la Russie réduit de manière injustifiée et significative les approvisionnements vers l’Europe, créant ainsi une crise artificielle sur les marchés et augmentant les prix de l’énergie.

Aujourd’hui, la situation n’a fait qu’empirer : les approvisionnements en gaz naturel en provenance de Russie sont devenus totalement instables et imprévisibles, de sorte que l’Europe se trouve en crise énergétique. Le 7 mars 2022 déjà, les prix du gaz naturel en Europe ont atteint un sommet historique de 3700 dollars par millier de mètres cubes sur la bourse ICE Futures. Et le prix du pétrole Brent a atteint près de 129 dollars le baril en mars pour la première fois depuis 2008 (pour comparaison, en mars 2021, ce chiffre était compris entre 60 et 70 dollars le baril, et en mars 2017 – entre 50 et 56 dollars le baril).

Brent
Une qualité d'huile de référence qui est un mélange d'huiles produites en mer du Nord entre les côtes de la Norvège et de l'Écosse.

Les législateurs européens ont plusieurs fois accusé la Russie d’utiliser les exportations d’énergie comme un moyen de pression. Cette politique se manifeste clairement aujourd’hui encore : le géant énergétique public russe Gazprom a interrompu toutes les exportations de gaz par le gazoduc Nord Stream depuis le 31 août, en invoquant la maintenance des compresseurs. L’approvisionnement était censé reprendre dans trois jours, mais Gazprom a ensuite annoncé que le gazoduc était arrêté pour une durée indéterminée, prétendument en raison d’une fuite de pétrole. La Russie a désigné les sanctions comme la cause des problèmes : elles semblent empêcher le pays de maintenir et d’exploiter efficacement le pipeline. Bien entendu, cette rhétorique détourne la communauté internationale, et surtout le consommateur moyen, des questions sur les crimes de guerre que l’armée russe commet quotidiennement sur le territoire de l’Ukraine. La population de certains pays, cherchant à retrouver au plus vite les prix d’avant la crise, peut succomber et (ou) promouvoir le message du pays agresseur selon lequel la levée des sanctions éliminera le problème. Cependant, une telle position est à courte vue (car la levée ou l’assouplissement des sanctions imposées à la Fédération de Russie ne mettra pas fin à la guerre, mais ne fera que la prolonger) et, dans une certaine mesure, collaborationniste : se placer du côté de la Fédération de Russie, la justifier ou déclarer “nous sommes pour la paix” signifie en fait soutenir et souvent financer une guerre à grande échelle en Ukraine.
En Europe, le gaz naturel est la principale source d’énergie pour les foyers et l’industrie, et 40% de cette énergie provient de Russie. Les pays commencent à chercher des solutions alternatives, mais cela se traduit par une diminution de l’offre sur le marché, et donc par une augmentation des prix de l’électricité pour la population et les entreprises.

“Nord Stream”
De l'anglais. Nord Stream est un gazoduc qui passe par le territoire de la Russie, de la Suède, du Danemark et de l'Allemagne et fournit directement du gaz naturel russe à l'Europe occidentale.

Curieusement, malgré les sanctions internationales contre la Fédération de Russie, l’abandon par certains pays des sources énergétiques russes et la suspension du projet Nord Stream, le montant des profits que la Russie a tirés de l’exportation de pétrole et de gaz vers l’Europe au cours des 100 premiers jours de l’invasion à grande échelle a doublé par rapport au chiffre de l’année dernière, atteignant 93 milliards de dollars, en raison des prix élevés. Cela permet à la Russie de poursuivre la guerre en Ukraine et de faire du chantage à l’Europe.

La crise économique

La crise énergétique en entraîne une autre, économique celle-là. Lorsque les prix des combustibles augmentent, les consommateurs souffrent non seulement à la station essence, mais aussi indirectement, car la hausse des coûts de transport fait augmenter les prix de tout, de la nourriture aux divers services. La guerre en Ukraine a frappé l’économie mondiale, qui commençait à peine à se remettre des bouleversements du COVID.

Le président de la Banque mondiale, David Malpass, déclare que, selon les projections, la croissance économique mondiale ralentira de 2,7% entre 2021 et 2024. C’est plus que le double du taux enregistré entre 1976 et 1979, date à laquelle la stagflation a été observée pour la dernière fois, c’est-à-dire une situation dans laquelle les principaux processus économiques ralentissent (la demande diminue, les entreprises et les sociétés freinent) et l’inflation augmente.

Selon les données de l’agence statistique européenne Eurostat, l’indice des prix à la consommation en Europe a atteint 8,1% en mai, soit le niveau le plus élevé depuis 1997. En juin, cet indicateur avait déjà atteint 8,6%.
Ce saut des prix signifie que pour de nombreuses personnes dans le monde, la nourriture qu’elles pouvaient acheter hier n’est plus accessible aujourd’hui. Cette crise du coût de la vie condamne des millions de personnes à la pauvreté, voire à la famine, à une vitesse vertigineuse.

L’inflation touche surtout les pauvres et les personnes vulnérables et contribue à aggraver les inégalités dans le monde. Selon un rapport du Programme des Nations unies pour le développement (PNUD), les pays les moins développés d’Europe et d’Asie de l’Est sont déjà confrontés à une récession, une phase du cycle économique dans laquelle il y a un déclin général de l’activité économique.

Les graves conséquences de la crise sur tous les indicateurs de pauvreté sont déjà ressenties par des pays comme l’Arménie et l’Ouzbékistan en Asie ; le Burkina Faso, le Ghana, le Kenya, le Rwanda et le Soudan en Afrique ; Haïti en Amérique latine ; le Pakistan et le Sri Lanka en Asie du Sud. En Éthiopie, au Mali, au Nigeria, en Sierra Leone, en Tanzanie et au Yémen, l’impact pourrait être particulièrement fort pour les personnes se trouvant en-dessous du seuil de pauvreté, et en Albanie, en République kirghize, en Moldavie, au Tadjikistan et en Mongolie, l’influence négative pourrait être la plus forte.

Cependant, la vie des pays les plus pauvres ne sera pas la seule à changer. Par exemple, en Grande-Bretagne, la hausse des prix a pour conséquence que de plus en plus de personnes ne peuvent pas se permettre d’acheter des aliments de base et se tournent vers les banques alimentaires. Si le prix du gaz reste au niveau de la mi-2022, les factures d’électricité augmenteront encore plus, ce qui aura un impact significatif sur les revenus des consommateurs – et pas seulement en Grande-Bretagne, mais aussi dans d’autres pays européens.

Banque alimentaire
Organisation caritative qui collecte des produits alimentaires auprès de producteurs, d'organisations commerciales, d'établissements de restauration et de particuliers et les distribue aux personnes qui souffrent de la faim.

Les crises humanitaires et migratoires

L’invasion de l’Ukraine par la Russie est la cause de l’un des plus grands et des plus rapides mouvements de réfugiés en Europe depuis la Seconde Guerre mondiale.

Selon l’Agence des Nations unies pour les réfugiés, au 20 juin 2022, le nombre de réfugiés dans le monde a dépassé les 100 millions, dont un tiers d’enfants. Ce sont des chiffres records, même si, selon le rapport de l’ONU en 2021, l’indicateur était déjà un record. La raison de ce déplacement de personnes sont les guerres, les conflits armés, les rébellions et les répressions, qui ont eu lieu principalement dans les pays africains.

À la fin de l’année 2021, le nombre de personnes qui ont été contraintes de quitter leur domicile a atteint 89,3 millions. C’est 8% de plus qu’en 2020 et plus du double qu’il y a 10 ans. Le niveau le plus élevé de déplacement interne a été enregistré dans des pays comme la Syrie, la Colombie, la République démocratique du Congo, le Yémen, l’Éthiopie et l’Afghanistan. Et maintenant, l’Ukraine a rejoint la liste : selon l’ONU, en juin 2022, plus de 14 millions d’Ukrainiens ont été déplacés et plus de 6 millions ont cherché refuge dans d’autres pays en raison de l’agression armée de la Russie.

Les grands mouvements de population créent des problèmes humanitaires. Avant le 24 février 2022, l’ONU tentait déjà de réunir l’argent nécessaire pour fournir l’aide humanitaire dont le monde a besoin. Cependant, pour son appel de 2021, l’ONU a reçu moins de la moitié du financement qu’elle demandait. Et chaque année, l’écart entre les besoins humanitaires et le financement ne fait qu’augmenter. À cause de cela, le Programme Alimentaire Mondial (PAM) a même dû réduire la quantité de nourriture fournie aux réfugiés et autres populations vulnérables en Afrique de l’Est et au Moyen-Orient.

Un grand nombre de réfugiés peut créer des charges supplémentaires sur les pays d’accueil, notamment dans les secteurs de l’éducation, de la santé, du travail et du logement. Cela est particulièrement sensible lorsque les personnes arrivent non pas progressivement, mais en quantités anormalement importantes, comme dans le cas de l’Ukraine.

Un autre problème est qu’aucun mécanisme clair n’a été développé pour arriver en sécurité à une destination dans un autre pays. C’est pourquoi les personnes sont confrontées à des dangers supplémentaires, par exemple, le risque de rencontrer des trafiquants d’êtres humains ou d’autres groupes criminels. Le problème est également qu’il n’est pas toujours possible de s’intégrer pleinement dans le pays où les personnes trouvent refuge. En outre, après l’annonce de la mobilisation partielle dans la Fédération de Russie, les russes ont commencé à partir en masse vers les pays où les Ukrainiens avaient reçu un asile temporaire pour fuir la guerre. Cela exacerbe les tensions au sein des pays et peut conduire à des conflits internes.

Les solutions à ce problème sont en déficit croissant dans le monde, car de plus en plus de personnes sont contraintes de fuir plutôt que de rentrer chez elles en raison des actions criminelles quotidiennes de l’armée russe et du flirt du pays agresseur avec la question nucléaire. Le Conseil de sécurité des Nations unies est de moins en moins capable de prévenir les conflits armés et de résoudre les crises de réfugiés prolongées qui ne cessent de se répéter.

La crise écologique

La guerre russo-ukrainienne a causé des dégâts sérieux et à grande échelle à l’environnement et à la santé de la population. Certaines conséquences néfastes sont déjà évidentes, d’autres affecteront les écosystèmes de l’Ukraine et du monde entier à long terme.

En juillet 2022, l’Organisation de coopération et de développement économiques a publié un rapport majeur sur les problèmes environnementaux que la Russie a causés et continue de causer par ses actions criminelles sur le territoire de l’Ukraine. Le rapport révèle que le pays agresseur bombarde des forêts, des écosystèmes terrestres et marins, des installations industrielles, des infrastructures de transport, ainsi que des infrastructures d’approvisionnement en eau, d’assainissement et de gestion des déchets. En raison des attaques constantes contre les raffineries de pétrole et les usines chimiques, les installations énergétiques, les dépôts et les pipelines industriels, l’air, l’eau et le sol de l’Ukraine sont contaminés par des substances toxiques, qui peuvent menacer la santé de la population à long terme. Beaucoup de ces problèmes sont transfrontaliers, c’est-à-dire que leur impact se fera sentir non seulement en Ukraine, mais aussi bien au-delà de ses frontières.

Les opérations militaires conduisent à une augmentation de la quantité de déchets : déchets ménagers, de construction (bâtiments détruits ou endommagés), militaires (équipements brûlés, fragments d’obus, drones) et médicaux. Certains d’entre eux sont toxiques et nécessitent une manipulation, un transport et une élimination spécifiques, ce qui, d’une part, est impossible pendant les combats actifs et, d’autre part, nécessite la mise en œuvre de solutions systémiques distinctes aux niveaux national et local. Les substances toxiques contenues dans les résidus de munitions peuvent également se répandre dans le sol et contaminer les eaux de surface et souterraines. Les munitions et les projectiles qui n’ont pas explosés constituent une autre menace persistante.

Les militaires russes ont également bombardé des dépôts de combustible et des raffineries de pétrole dans toute l’Ukraine, provoquant de grands incendies et des émissions de polluants, notamment de suie, de méthane et de dioxyde de carbone.

L’expérience des guerres précédentes montre que ces émissions se propagent sur de longues distances et que, par conséquent, les victimes en souffriront bien au-delà des frontières des territoires où la guerre s’est directement déroulée. Ainsi, au Koweït, au début des années 1990, des soldats irakiens ont mis le feu à plus de 650 puits de pétrole, qui ont ensuite brûlé pendant 10 mois. Il s’en est suivi une fuite massive de pétrole brut dans le désert, puis dans le golfe Persique. Selon la NASA, environ 300 lacs de pétrole se sont alors formés, et une couche de suie et de pétrole est tombée du ciel et, après avoir été mélangée avec du sable et du gravier, a recouvert 5 % du paysage koweïtien de “béton asphalté”. La surveillance de l’air de l’époque indique que la combustion du pétrole représentait 2% des émissions mondiales de dioxyde de carbone. Des échantillons de glace collectés des années plus tard sur des glaciers tibétains ont montré que la suie, soufflée par le vent sur des centaines de kilomètres, recouvrait les glaciers.

Les écosystèmes de l’Ukraine souffrent des actions de la Russie, ce qui affecte l’état de l’écologie mondiale. Actuellement, 44% des territoires écologiques les plus vulnérables du pays sont situés dans la zone des hostilités actives. Les troupes russes ont déjà pénétré ou mené des opérations militaires dans plus d’un tiers des zones naturelles protégées du pays, rendant vulnérables les écosystèmes qui s’y trouvent. Au total, l’Ukraine compte 35% de la biodiversité de l’Europe. On y trouve plus de 70 000 espèces de flore et de faune rares et endémiques (qui n’existent que sur un certain territoire), qui ont également été détruites par la Russie pendant la guerre.
Un autre problème est celui des corps des soldats russes morts, qui n’ont pas été retirés des terres ukrainiennes. Avec le temps, ils se décomposent, pourrissent et libèrent des bactéries dangereuses qui peuvent être consommées par les animaux sauvages. Non seulement ces derniers propagent l’infection, mais ils en meurent également. De plus, les bactéries dangereuses provenant des cadavres des occupants contaminent le sol, ce qui peut affecter la végétation et les animaux qui vont la consommer dans le futur.

Les combats qui se déroulent le long des côtes ukrainiennes causent d’énormes dégâts à l’environnement aquatique. En juin déjà, plusieurs milliers de dauphins ont été retrouvés morts sur les côtes de Bulgarie, de Roumanie, de Turquie et d’Ukraine. La guerre peut également affecter la population générale et provoquer une migration massive des espèces marines vers le sud.

La Russie est également à l’origine d’impacts environnementaux indirects liés à l’énergie. Ils compliquent la réalisation des objectifs climatiques prévus par l’accord de Paris. Aujourd’hui, au lieu d’une transition plus rapide vers les sources d’énergie renouvelables, l’Union européenne prévoit de remplacer une partie du gaz russe par du gaz en provenance des États-Unis, qui présente un niveau élevé d’émissions.

Accord de Paris sur le climat
Accord dans le cadre de la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques visant à réglementer les mesures de réduction des émissions de dioxyde de carbone à partir de 2020.

Certaines menaces environnementales causées par la guerre peuvent se manifester de nombreuses années après la fin de la guerre. Par exemple, en 2016, au sein de la Fédération de Russie, l’état d’urgence a été instauré en raison d’une épidémie d’anthrax dans des colonies sibériennes. Le fait est qu’en 2016, en raison d’un réchauffement anormal, en particulier dans cette région, l’agent pathogène de l’anthrax s’est “réveillé” du pergélisol, après s’y être caché dans les années 1940, lorsque la Seconde Guerre mondiale faisait rage dans le monde. À cette époque, de nombreux troupeaux de rennes sont morts en raison d’ulcères, et l’agent pathogène de la maladie s’est “conservé” dans le corps des animaux qui ont été enterrés dans le sol gelé. Et maintenant, plus de 70 ans après la fin de la guerre, les habitants de la région en ressentent les conséquences environnementales.

La crise nucléaire

Non seulement, la Russie exerce un chantage sur le monde entier avec des armes nucléaires, mais elle crée également de véritables précédents qui peuvent conduire à une catastrophe réelle, dont les conséquences sont difficiles à prévoir, même pour les scientifiques.

Au début de l’invasion à grande échelle, la Fédération de Russie a mené des opérations militaires et stocké des tonnes de roquettes près de la centrale nucléaire de Tchernobyl, où le pire accident de centrale nucléaire au monde s’est produit. Les incendies de forêt provoqués par les bombardements à proximité du réacteur nucléaire de Tchernobyl ont entraîné le relâchement de substances radioactives dans l’atmosphère. De plus, en raison du trafic intense, dès le premier jour de l’invasion, le rayonnement gamma dans la zone de Tchernobyl était environ 28 fois supérieur à la norme annuelle.

L’invasion russe est le premier cas dans l’histoire du monde où la guerre se déroule à proximité de centrales nucléaires, et le premier précédent où une centrale nucléaire a été saisie par la force et où les travailleurs ont été forcés de gérer l’entreprise sous la menace d’une arme (il s’agit de la centrale nucléaire de Zaporizhzhya située dans la ville d’Enerhodar à Podniprovia et Zaporizhzhia).

Les occupants lancent également des attaques constantes de missiles sur les agglomérations voisines de la centrale nucléaire de Zaporizhzhya, et parfois sur la centrale elle-même. En septembre, à la suite d’un nouveau bombardement de mortier sur le site de la centrale ZNPP, la protection d’urgence a été activée et la 5e unité de puissance a été arrêtée. En août, trois capteurs de rayonnement ont été endommagés à la suite d’un bombardement. Lorsque les institutions internationales et les politiciens ont appelé la Russie à créer une zone démilitarisée autour de la centrale, elle a rejeté cet appel.

La centrale nucléaire de Zaporizhzhia est la plus grande centrale nucléaire d’Europe. Si un accident se produisait dans l’un de ses réacteurs actifs, les terribles conséquences toucheraient non seulement l’Ukraine, mais aussi les pays voisins, car le vent peut transporter des particules radioactives très loin de l’épicentre. Il s’agit non seulement de la pollution d’immenses territoires, mais aussi des dommages radioactifs de millions de personnes. Comme le montre l’expérience de la centrale de Tchernobyl, les conséquences de l’explosion affecteront plusieurs générations à venir.

L’armée russe bombarde périodiquement les centrales nucléaires ukrainiennes, accusant les militaires ukrainiens. Lors d’une des attaques contre la centrale nucléaire d’Ukraine du Sud en septembre, une roquette est tombée à 300 mètres des réacteurs. L’onde de choc a endommagé les bâtiments de la station et brisé plus de 100 fenêtres.

La Russie utilise la terreur nucléaire comme une arme, menaçant le monde entier d’utiliser ce type d’arme. Ainsi, une semaine avant le 24 février, le Kremlin a annoncé qu’il allait entraîner ses forces nucléaires et que Poutine lui-même superviserait les lancements de missiles. Pendant la grande guerre, le 20 avril, la Russie a également testé un nouveau missile à longue portée. En même temps, Poutine a averti tout le monde que cela devrait “faire penser deux fois ceux qui, dans le feu d’une rhétorique agressive frénétique, essaient de menacer son pays.”
Le 21 septembre, lors de l’annonce de la mobilisation partielle, le président de la Fédération de Russie a de nouveau menacé de se servir des armes nucléaires et a déclaré que la Russie était prête à les utiliser en cas d’attaque sur son territoire. Au même moment, Poutine a annoncé les pseudo-référendums dans les régions de l’Ukraine temporairement occupées. Cela signifie qu’après leur tenue, la Fédération de Russie considérera que ces territoires font partie de la Russie, et qu’une attaque la-bas – de facto la défense de leurs terres par les Ukrainiens – peut être la raison de l’utilisation d’armes nucléaires par le pays agresseur. Après cela, la manipulation et le chantage ne s’arrêtent pas – divers politiciens font périodiquement des déclarations ambiguës sur l’utilisation potentielle d’armes nucléaires. Par exemple, le 27 septembre, l’ancien président de la Fédération de Russie Medvedev a déclaré que la Russie avait le droit d’utiliser des armes nucléaires si nécessaire, et le 30 septembre, le secrétaire de presse de Poutine, Peskov, a dit qu’ils ne voulaient pas développer le sujet de “l’escalade nucléaire” au Kremlin et qu’ils appelaient tout le monde à se comporter de manière responsable.

La crise de sécurité

Les actions terroristes de la Russie ont provoqué la plus grande crise de sécurité en Europe depuis la guerre froide, obligeant les pays européens à unir leurs forces pour aider l’Ukraine dans sa résistance à Moscou. La Russie viole les obligations et les accords internationaux, exerce un chantage sur le monde entier et menace la sécurité de millions de personnes.

Le pays agresseur est la plus grande menace pour la paix et la sécurité internationales de ces dernières décennies, car il continue de violer systématiquement la souveraineté d’autres États : au cours des 30 dernières années, il s’agit de l’Ukraine, de la Géorgie et de la Moldavie.

La Fédération de Russie a cassé l’architecture de sécurité que les Européens ont construite pendant des années, et continue de négliger tous les engagements internationaux pris au cours des trois dernières décennies. En outre, il oblige des pays auparavant neutres à se tourner vers le renforcement de leurs capacités défensives. Ainsi, la Finlande et la Suède ont présenté une demande d’adhésion à l’OTAN. D’autres États européens membres de l’OTAN et les États-Unis ont également augmenté de manière significative leurs dépenses militaires. Les autres pays comprennent également les risques potentiels liés au fait d’être voisin de la Fédération de Russie et mettent en œuvre les mesures de sécurité nécessaires. Par exemple, dans le budget de l’État pour l’année prochaine, la Pologne prévoit un montant record de 97 milliards de zlotys pour l’armée et la défense.

De nombreux pays consacrent des budgets importants pour aider l’Ukraine dans sa guerre avec la Russie, au lieu de favoriser le développement commun et la poursuite de la paix. Les Ukrainiens doivent combattre l’ennemi, qui n’est pas capable de négociations diplomatiques et de coexistence pacifique, au prix de leur propre bien-être et de leur vie.

Il y a des déclarations dans l’espace d’information selon lesquelles “les problèmes dans le monde ont commencé à cause de la guerre en Ukraine”, mais il est important de souligner et de se rappeler qui est derrière tout cela. Chacune de ces crises est de la responsabilité de la Fédération de Russie, qui a commencé cette guerre, et non de l’Ukraine, qui défend non seulement sa terre et son indépendance, mais aussi l’ensemble de l’Europe. En outre, aujourd’hui, la guerre n’est pas seulement menée pour des territoires, mais pour des valeurs existentielles – la liberté, le droit à la vie, le développement de soi en tant qu’individu et en tant que membre d’une nation indépendante.

L’incitation aux conflits et aux guerres sous le déguisement “d’opérations spéciales”, de “libération” ou de “missions de maintien de la paix” est un style constant de la politique invasive de la Russie. Il faut donc que la communauté internationale comprenne que la seule façon de sortir de cette situation est la victoire de l’Ukraine, sinon l’agresseur pourrait finir par empiéter sur d’autres États.

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Ce matériel a été produit avec le soutien d'International Media Support (IMS).

Le dossier est préparé par

L'auteur du Ukraїner:

Bogdan Logvynenko

Auteure:

Eléonore Tchornomortchenko

Rédactrice en chef:

Ania Yablutchna

Rédactrice:

Kateryna Lekhka

Éditeur photo:

Yurij Stefaniak

Responsable de contenu:

Yana Rusina

Traducteur:

Vadym Hadetskyi

Rédacteur de traduction:

Helene Skapski

Coordinatrice de la traduction:

Olga Gavrylyuk

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